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Les Tragédies de Racine (2)
--> Iphigénie / Phèdre / Antigone

Si Andromaque est sa pièce la plus connue, ce n'est pas pour autant la seule à pouvoir nous fasciner. Racine a repris plusieurs autres mythes grecs (centrés comme à son habitude sur des personnages féminins), tout aussi forts et intéressants. Ses héroïnes ne se ressemblent pas : l'une est soumise, l'autre adultère et la dernière rebelle, offrant à ses lecteurs une diversité de caractères et de situations qui nous séduisent. L'amour est à chaque fois l'un des moteurs essentiels du drame, avec la foi et le pouvoir.


Iphigénie :

Je dois dire que personnellement, c'est peut-être la pièce qui m'a le plus touchée. J'ai été particulièrement émue par des personnages si humains et si déchirés, partagés entre leur amour et leur devoir. Et c'est peut-être la seule tragédie grecque de Racine qui se termine avec un semblant d'espoir ! On y trouve également la question de l'importance de la religion chez les Grecs, et le problème de la cruauté des dieux qui s'amusent avec les humains.

Iphigénie est la fille aînée d'Agamemnon et de Clytemnestre, couple royal d'Argos. Son père commande l'armée qui s'apprête à marcher sur Troie pour récupérer Hélène, mais les dieux ne semblent pas favorable à ce départ : ils maintiennent les bateaux à quai sans leur envoyer le moindre souffle de vent.

Un puissant devin annonce alors au roi que les dieux exigent un sacrifice et qu'ils demandent une descendante d'Atrée : la pure Iphigénie. Agamemnon tente par tous les moyens de se soustraire à la volonté divine et refuse obstinément de livrer sa fille, jusqu'à ce qu'Ulysse le raisonne et lui fasse miroiter la gloire éternelle qui les attend à Troie. Contre son gré, le roi finit par demander à sa fille de le rejoindre au camp, sous prétexte de hâter son mariage avec Achille.

Pourtant, quand Iphigénie arrive enfin accompagnée de sa suite, son père cherche encore à la protéger en lui faisant croire que son fiancé a changé d'avis. Mais Achille ne tarde pas à dissiper le malentendu et à réclamer des explications ; le projet de sacrifice est alors dévoilé et le drame se noue. Tandis que la jeune fille se résigne à cette fatalité à laquelle tout l'amour de son père ne peut la soustraire, Achille et Clytemnestre veulent la protéger envers et contre tout.

C'est devant l'autel que le salut arrive, au milieu des larmes et des combats : le devin révèle qu'une autre princesse inconnue descend d'Atrée sans le savoir. La jeune captive troyenne qu'Iphigénie a amené à sa suite est en réalité la fille illégitime d'Hélène et de Thésée, qui sera donc sacrifiée à la place de sa demi-sœur. Les autres personnages sont sains et saufs ! (On s'apitoie moins sur le sort de la malheureuse princesse quand on sait qu'elle voulait provoquer la mort d'Iphigénie en dévoilant à toute l'armée la volonté des dieux, par pure jalousie. Racine a pris soin de ne pas en faire une martyre.)

Phèdre :

On peut se sentir dans cette pièce plus mal à l'aise qu'avec les autres, puisque l'on y adopte la voix et le point de vue d'une femme adultère. Phèdre a de nombreux défauts : elle tombe amoureuse de son beau-fils avant d'en rejeter la faute sur lui, se montrant à la fois lâche et infidèle. Mais son humilité et son désarroi face à ses crimes, s'ils ne suffisent pas à nous la rendre sympathique, permettent tout de même de mieux la comprendre et de ne pas la juger trop vite. Sa fin tragique reste pourtant la seule échappatoire possible.

Phèdre est la femme de Thésée, roi d'Athènes, qui est porté disparu au début de la pièce. Elle se laisse dépérir peu à peu en refusant de donner libre cours à ses passions. Pourtant, quand on lui apprend la mort de son mari, elle se livre enfin et finit par déclarer sa flamme à son beau-fils, Hippolyte, né d'une Amazone. Presque malgré elle, elle espère pouvoir assumer cet amour incestueux.

Mais alors qu'Hippolyte découvre avec horreur les sentiments de sa belle-mère, une nouvelle surprenante leur parvient : Thésée serait en vie.  Quand le retour du roi est officiellement annoncé, Phèdre effondrée ne sait pas comment gérer la situation. Elle craint la colère de son mari et la vengeance de son beau-fils. ne voyant que le suicide comme solution radicale. Pour prévenir le drame, sa servante décide de prendre les devants : elle annonce au roi dès son arrivée que le jeune prince a tenté d'abuser de la reine.

Thésée furieux demande des comptes à son fils, mais le noble Hippolyte ne veut pas dévaster son père en lui apprenant la traîtrise de sa femme. Il se tait. Pour prouver son innocence, il invoque uniquement son amour envers Aricie, princesse d'une famille ennemie placée sous la tutelle sévère de Thésée. (C'est ce même amour qui empêche Phèdre jalouse d'avouer le subterfuge). Mais le roi ne le croit pas et prie Poséidon de maudire ce fils ignoble, lui réclamant sa mort.

Son vœu est hélas exaucé : tandis qu'Hippolyte exilé longe la côte pour quitter la ville, un monstre hideux sort de la mer et effraie les chevaux. Le jeune homme est jeté par terre et piétiné par les bêtes paniquées. À l'annonce de sa mort, Phèdre en rejette le blâme sur sa servante qui se tue par désespoir, puis révèle la vérité à Thésée avant de s'empoisonner.

La Thébaïde (Antigone) :

J'associe à cette pièce le personnage d'Antigone, car c'est sans aucun doute le plus connu, mais ce n'est pas forcément l'héroïne principale de l'histoire. Le sous-titre de ce texte est en effet Les Frères ennemis, ce qui indique que Polynice et Étéocle en sont les véritables protagonistes. C'est également la pièce la plus tragique de toutes celles dont j'ai parlé ici, qui voit mourir presque tous ses personnages d'une manière ou d'une autre. On y assiste à une lutte acharnée pour le pouvoir et au déchirement d'une famille, associés à la malédiction d'un sang impur (les crimes du père expiés par les enfants et par tous les autres membres de la famille).

Après la révélation de la véritable identité d'Œdipe et sa fuite hors de Thèbes, le pouvoir royal doit être partagé entre ses deux fils, Polynice et Étéocle, afin qu'ils règnent à tour de rôle. Mais quand vient le tour de Polynice, son frère refuse de lui céder la place et obtient le soutien du peuple pour conserver le trône. Polynice s'entête et va lever une armée en Grèce, afin de revenir ensuite assiéger la ville.

Dans ce conflit sont pris malgré eux les autres membres de la famille royale : Jocaste d'abord, leur mère, qui ne peut se résoudre à voir mourir l'un de ses fils, ainsi que sa fille Antigone qui souhaite l'aider à instaurer la paix. Vient ensuite Créon, leur oncle, qui a pris le parti d'Étéocle pour servir ses propres intérêts, alors que son fils Hémon a rejoint l'ennemi. (On apprend au cours de la pièce qu'Antigone et Hémon sont amants, et que c'est elle qui a envoyé à son frère rebelle ce courageux protecteur.) L'autre fils de Créon, Ménécée, soutient son père et le roi légitime.

Ce nœud gordien ne peut pas se résoudre pacifiquement, et la trêve est aussi instable que fragile. Des négociations s'achèvent brusquement à peine entamées, des soldats prennent des initiatives malencontreuses,  la tension monte des deux côtés. On sent que le danger peut surgir à tout moment, mais on ignore sous quelle forme et dans quelle direction.

Le dénouement dépasse encore les prévisions les plus pessimistes et ne laisse comme témoins vivants de l'Histoire que des personnages secondaires (une servante, un garde...).  Le noble Ménécée meurt le premier, de son plein gré, en offrant sa vie pour raisonner les combattants et mettre fin à la querelle. Hélas, le calme n'est que temporaire, et Jocaste le suit de près dans la tombe, ayant vu échouer ses tentatives de réconciliation et préférant se poignarder plutôt que de voir ses fils s'entretuer.

Hémon à son tour tente d'arrêter les deux frères, se jetant entre eux et détournant leurs épées, mais il ne survivra pas à leur fureur aveugle. Sa mort n'empêche pas Étéocle et Polynice de s'entretuer, expirant dans un même souffle et laissant la couronne à Créon. Mais celui-ci provoque le suicide d'Antigone en lui apprenant la nouvelle, et malgré son ambition il ne peut supporter de perdre ainsi la femme qu'il aimait en secret. Il meurt de chagrin et de douleur.

Posé par Némésia dans l'étagère Théâtre

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